GDPR compliant : le petit signal « conforme au RGPD » que l’on va voir partout
Qui a pris en charge le dossier « RGPD » (règlement général de protection des données ou GDPR en anglais) dans votre entreprise ? Qui est en charge du label « GDPR compliant » ?
Le service juridique ? La DSI ? Le marketing ? Parfait.
Avez-vous songé à mobiliser aussi le contrôle de gestion et la direction financière ?
Il serait intéressant d’avoir leur avis.
Et ce, pour une seule raison : leur réponse à cette question-clé :
« A combien valorisent-ils le fichier d’abonnés à vos emailings ? Ces abonnés où l’on trouve vos futurs clients, vos clients actuels et parmi eux, vos futurs ambassadeurs ? »
Il faudrait ajouter à cette question, une question subsidiaire : « Comment estiment-ils que cette valorisation doive progresser dans les 3 ou 5 ans qui viennent ? »
Vous êtes sans doute en train de vous demander à la lecture de ces premières lignes s’il n’y a pas eu une erreur de copier-coller.
Le titre de cet article vous parle de « créativité » et les premières lignes traitent de « comptabilité ».
Le correcteur d’orthographe aurait-il zappé entre les deux mots ?
La créativité a besoin des comptables
Pas du tout. Si l’on va tant avoir besoin de créativité avec le RGPD, c’est directement ou indirectement sous la pression de cette question de valorisation comptable.
Quand on découvre le sujet RGPD, on commence, en général, par réagir avec colère.
« C’est quoi encore cette nouvelle idée des fonctionnaires de Bruxelles pour emmerder le monde ? »
On enchaîne ensuite en s’intéressant à la technicité de l’affaire (« appelez-moi la DSI ») puis à la partie juridique (« appelez-moi notre avocat »).
Si l’on se contente de cela, on risque fortement de passer à côté de la formidable opportunité que représente la mise en place du RGPD, à compter du 25 mai 2018.
Cette opportunité est de l’ordre de la révolution copernicienne.
Elle consiste à envisager différemment ce que doit devenir votre liste.
Votre liste est un diamant…
Oui. Votre liste. Avec le RGPD, il va falloir changer de vocabulaire. En tout cas, pour ce qui concerne la prospection commerciale. Il va falloir oublier le terme de « fichier » et parler définitivement de « liste ».
La différence entre les deux ? Celle qu’il y a entre un simple local commercial et une véritable boutique. Entre les deux, il y a … le fonds de commerce. Celui-ci est fait de quantité de choses dont le nombre de clients et la zone de chalandise sur laquelle s’exerce l’attraction de la boutique.
Des fichiers, c’est la même chose qu’un simple local commercial. Cela est très froid, technique. C’est juste une affaire d’adresses à acquérir, un sac à remplir. Bref, cela relève du centre de coût.
La liste, c’est autre chose. Ce sont des abonnés. Parmi eux, il y a des clients, des futurs clients, des fidèles, des « à fidéliser ». Bref. Une liste, ce ne sont pas des gens à qui on veut vendre.
Ce sont des gens avec qui on a une relation, que l’on appelle par leur prénom et leur nom dans les mailings. Exactement comme le commerçant avisé dont la boutique fait partie d’un excellent fonds de commerce connaît lui aussi ses clients par leur petit nom.
La liste, c’est un objet dont on analyse et dont on peaufine tous les segments, dont on se demande en permanence si tel ou tel membre correspond à tel ou tel portrait-robot de client, dont on cherche en permanence à savoir si telle ou telle offre lui serait agréable à telle occasion.
Bref. La liste, c’est un bijou. Un petit diamant que l’on doit regarder sous tous les angles, chaque jour de l’année, car il brille chaque jour différemment, que l’on doit nettoyer pour que ne s’y égare aucun grain de sable, et ce, également, chaque jour de l’année.
Et qui dit « diamant » dit valeur.
Et donc, puisque nous parlions comptabilité, si votre directeur financier n’a pas encore compris que votre liste est un diamant, c’est sans doute que vous ne lui avez parlé jusque-là que de … fichiers.
Voilà pourquoi vous allez avoir besoin de créativité.
A condition que vous ne la considériez pas …. comme un vulgaire fichier
Si votre politique a jusque-là consisté à arroser au plus large, pour transformer, emailing après emailing, un pouième de chaque fichier utilisé en « prospects plus ou moins qualifiés », si elle a consisté à transformer chaque client, de gré ou de force, en l’heureux destinataire de votre soi-disant « newsletter » qui se révèle être en fait un assemblage de termes laudateurs à propos d’offres spéciales, si les gens à qui vous vous adressez ouvrent les emails que vous leur envoyer à moins de 15%, soyons clair : vous êtes mal barré.
Vous n’êtes absolument pas en train de vous constituer une liste qui vaudra bientôt la valeur d’un diamant.
Vous n’avez jamais qu’un fichier de destinataires de votre prose qui ont toutes les raisons de profiter de l’ambiance qui s’installe, faite de défiance vis-à-vis des détenteurs de données et de réglementation RGPD, pour se désinscrire ou ne pas souscrire à un nouvel accord en bonne et due forme pour continuer à recevoir vos emails.
Si vos comptables et contrôleurs de gestion ont eu la bonne idée de répondre par un chiffre précis à la question de la valeur de ces fichiers d’abonnés évoquée toute à l’heure, ils vont devoir revoir cette valeur … à la baisse et la faire tendre vers zéro !
Mettez-vous dans la peau de vos clients
Comment faire pour ne pas tout perdre ?
Commencez par vous mettre dans la peau de vos clients.
Et comme on le dit au café du commerce, prenons un exemple au hasard : moi !
Il faut que je vous précise que, physiquement, je fais partie des français moyens tout à fait dans la moyenne, je mesure 1m73, je pèse 73 kg, ma silhouette est vraiment celle de Monsieur tout le monde.
Et si je me permets ce détour par mon nombril c’est que, sans vouloir me vanter, je suis l’heureux destinataire des emails d’une grande marque qui me bombarde d’offres spéciales tout à fait formidables.
Qui est cette grande marque ? La grande spécialiste des ensembles divers et variés pour les femmes rondes qui aiment la mode.
Je me suis donc forcément demandé pourquoi cette grande marque me gratifiait de sa sollicitude.
Je me suis demandé comment j’avais pu atterrir sur un tel fichier. Imaginez si j’avais l’esprit mauvais coucheur. Je commencerais par bouillir de mauvaise humeur, accusant cette enseigne de fouiller dans les données d’internet et, qui sait, d’avoir peut-être espionné mes recherches sur Google, un jour où je cherchais à illustrer un article sur l’obésité.
Sans tomber dans ces excès, j’ai mené l’enquête. Et j’ai trouvé.
Cette marque est en fait une filiale de l’entreprise chez qui j’achète mes costumes.
Cette entreprise a donc récupéré mon email la dernière fois que j’ai rempli un bon de garantie ou je ne sais quelle carte de fidélité. Et donc, elle en profite pour me bombarder de tous ses contenus, que je sois concerné ou pas.
Après tout, sait-on jamais, des fois que ma femme, ma fille ou ma belle-mère soient grosses…
Ne pas provoquer les mauvais coucheurs
Cette approche est typiquement une approche à l’ancienne. Arroser pour arroser, en se disant qu’il y aura toujours 0,01% de gens qui répondront favorablement, c’est ne pas voir que le temps tourne à l’orage et qu’on n’arrose pas pendant l’orage.
Il est temps de passer des fichiers à la Liste.
La liste ne doit contenir que des adresses de gens qui apprécient vos contenus.
Pour cela, il faut d’une part que ceux-ci soient faits pour eux et soient intéressants, ce qui signifie que vous ayez autre chose à leur dire que des litanies successives d’arguments de vente (sinon, ils vous verront venir et n’ouvriront plus vos mails que pour se désinscrire de votre liste), et d’autre part qu’ils soient ciblés et personnalisés.
Comment faire concrètement ? Comment doit s’en sortir la marque pour les femmes rondes qui arrose même les hommes minces ?
Comment peut-elle obtenir de l’engagement de la part des membres de ses « fichiers » afin de ne pas les perdre ? Comment peut-elle en faire des abonnés de valeur à sa prochaine « Liste » ?
Comment peut-elle profiter de l’opportunité RGPD ?
Concrètement, il va lui falloir donner à chacun une bonne raison d’être présent sur cette liste et d’y rester, il lui faudra souvent redemander son accord (optin) pour y figurer et accepter qu’il y ait ensuite un traitement de ces données.
Comment cette marque peut-elle obtenir un accord de ma part, alors même que je suis à deux doigts de faire preuve à son égard d’un état d’esprit de mauvais coucheur ?
Soyez créatifs
C’est là qu’il faut faire appel à un peu de créativité et produire du contenu. Du véritable contenu, pas de la promo. Quelque chose qui m’invite à agir. Je n’ai pas dit … acheter.
Imaginez que je reçoive l’email suivant :
« Philippe, aidez-nous à faire en sorte que la mode libère les rondes.
Vous qui êtes un homme,
Vous qui aimez les femmes,
Likez ci-après les tenues dans lesquelles vous préférez les rondes.
Choisissez vos modèles préférés.
Notre combat a besoin que vous participiez à nos statistiques.
Merci de le soutenir. »
On ne me demande pas d’acheter, bien sûr, je ne suis pas dans la cible directe.
En revanche, comment ne pourrais-je pas être dans la cible indirecte, celle qui cautionne, celle qui influence, celle qui soutient un si beau combat.
Non seulement, je vais participer au jeu, feuilleter les tenues, donner mon avis, « liker » les modèles que je préfère, mais en plus je vais accepter bien volontiers que mes données personnelles soient utilisées pour un tel combat.
Les femmes qui, elles, sont dans le coeur de cible de cette grande marque, recevront ensuite, des mails qui diront quelque chose comme :
« Voici les maillots de bain « likés » par plus de 80% des hommes de notre panel. Ceux qui se battent avec nous pour que la mode libère les rondes.
Et voici ce qu’ils en disent… »
Là encore, on passe de vulgaires « fichiers » promotionnels à une « Liste » d’abonnés associés à un combat et engagés dans une véritable relation. Une communauté.
Les premiers ne valent rien et ne représentent que des coûts, la seconde a une valeur qui correspond à une promesse de recettes futures tout à fait intéressante. Une valeur qui ne demande qu’à croître.
Non seulement le RGPD ne va pas réduire cette valeur, mais il représente une occasion unique pour l’augmenter. A condition que l’on sorte définitivement du raisonnement « fichier et promotion » pour entrer de plain pied dans le raisonnement « Liste et contenu ».
Philippe Coll est le fondateur et président de l’Institut du contenu, spécialiste de l’acquisition clients et du parcours d’achat grâce aux techniques d’Inbound Marketing et de stratégies de contenus.